Le reconnaitre
Le Sonneur à ventre jaune (Bombina variegata) est un petit anoure (batraciens sans queue) de la famille des Bombinatoridae. La couleur dorsale est terne, brun-gris, qui se confond généralement à la teinte du substrat des ornières et autre point d’eau temporaire que cette espèce affectionne lors des périodes de reproduction.
A l’inverse, sa face ventrale est colorée d’un jaune vif, parfois orangé, alternée de taches noires ou bleues nuit. Ces couleurs, dites aposématiques, sont perçues par ses potentiels prédateurs comme un signal d’avertissement et associées à une venimosité. Il n’hésitera d’ailleurs pas à exhiber ces couleurs de manière à prévenir ces prédateurs potentiels du danger qu’il représente. Effectivement, le sonneur possède des glandes qui sécrètent du venin relativement puissant.
Un dimorphisme sexuel est visible surtout pendant la période de reproduction avec l’apparition de « callosités nuptiales » noirâtres sur le pouce des avant-bras du mâle. Un second caractère, indépendant de la saison, surtout visible à la loupe, est la présence de petites épines noires kératinisées sur les verrucosités dorsales, qui existent chez les femelles et chez les mâles mais qui sont beaucoup plus saillantes chez ces derniers (ACEMAV coll., 2003 ; Pichenot, 2008 et Chemin, 2010).
Ecologie
La maturité sexuelle des sonneurs est atteinte à l’âge de 2 ou 3 ans (ACEMAV coll., 2003 et Chemin, 2010), et sa reproduction se concentre principalement entre mai et juillet. Territoriaux, les mâles se déplacent peu sauf pour la recherche de partenaires et rayonnent autour de leur lieu de reproduction. Il semble que le succès de la reproduction soit favorisé par une distribution des œufs dans les différentes pièces d’eau. Ce trait de vie a une importance notable dans la gestion des habitats de reproduction. Néanmoins, la colonisation rapide de pièces d’eau nouvellement créées montre que l’espèce s’adapte également aux opportunités (Chemin, 2010).
Les pontes sont déposées en grappes dans la végétation aquatique, parfois même sur des plantes rivulaires tombant dans l'eau ou au fond de l’eau. La femelle effectue généralement plusieurs pontes dans la saison. Il semble également que les femelles ne pondent pas tous les ans mais s’adaptent en fonction des conditions climatiques notamment, afin d’exploiter au mieux le milieu. Le Sonneur utilise donc des stratégies de reproduction très particulières « où rien n’est fixé dans le temps » (Chemin, 2010).
L'éclosion des pontes et le développement des têtards sont rapides, donc bien adaptés aux conditions des milieux temporaires. La métamorphose a lieu lorsque les têtards atteignent une taille de 3.5 à 5 cm. Les jeunes sont assez similaires à l’adulte mais ne présentent pas immédiatement de taches jaunes sur le ventre, elles apparaissent soit en fin de saison pour les individus de premières pontes, soit le printemps suivant.
Le régime alimentaire varie suivant les stades de développement, à l’état de larve, il se nourrit d’algues et de diatomées, les jeunes se nourrissent de Collemboles principalement et les adultes de Diptères et de Coléoptères. Deux techniques d’alimentation sont utilisés par le sonneur, les mâles recherchent activement les proies à faible mobilité quant aux femelles et jeunes, ils attendent que des proies plus mobiles viennent à eux.
Lieux de vie
Les habitats utilisés par le sonneur en Charente sont très variés, mais le plus souvent en relation avec les milieux boisés. Les milieux temporaires, peu profonds, stagnants, peu végétalisés et bien ensoleillés sont préférentiellement utilisés. On le trouve ainsi, dans des ornières (forestières ou en bordure d'étangs), des suintements permanents ou temporaires, des mares forestières et de lisières, des fossés, des abreuvoirs, d'anciennes carrières récemment réhabilitées en étangs
Ces divers milieux présentent un point commun, ils sont soumis à une dynamique de perturbations physiques qui les rend temporaires ou qui mène à leur renouvellement. Ces perturbations peuvent être naturelles (crues et décrues des cours d’eau, successions d’assèchements et de remplissages par les précipitations, piétinement par la faune…) ou anthropiques (orniérage …).
Le cycle biologique du sonneur passe de l’habitat terrestre pour l’hivernage pour ensuite passer à l’habitat aquatique pour la reproduction. Les terriers, la mousse, l’humus ou encore sous des pierres ou souches sont les types d’habitats que cette espèce va utiliser entre octobre et avril. Ils doivent présenter un sol suffisamment humide toute l’année et de nombreux refuges et points d’eau.
Répartition
Depuis le début des années 1990, une trentaine de stations de Sonneur à ventre jaune a été découverte en Charente. La majorité d'entre-elles sont constituées de petites populations, souvent de moins de 10 individus. Néanmoins, certaines peuvent atteindre plus de 40 individus (Précigout, com. pers.). La répartition de l'espèce est localisée à la moitié Est du département, limitée à l'Ouest par une ligne Confolens - Barbezieux.
Le bocage du Confolentais et du Montbronais héberge la majorité des stations connues, les autres étant réparties dans les massifs boisés du Sud Charente (massif forestier de Saint-Romain notamment). Cette répartition correspond à la continuité de son aire de répartition connue à ce jour dans le Limousin (Précigout, 2002).
Protection
Le Sonneur à ventre jaune fait partie des batraciens à forte valeur patrimoniale, cumulant les statuts de protection.
- Annexes II et IV de la Directive européenne « Habitat, Faune, Flore »
- Liste des espèces protégées en France
- Liste Rouge nationale et régionale en tant qu’espèce vulnérable
- Annexe II de la convention de Berne
Sur le site
L’une des espèces patrimoniales les plus remarquables du site Natura 2000 de la Vallée de la Tardoire, le sonneur à ventre jaune est l’objet de nombreux suivis.
Les résultats de ces suivis ont pour le moment permis d’identifier les principales stations du site où cette espèce est présente. Malheureusement, ces suivis ont également permis de mettre en évidence la grande fragilité de cette espèce, extrêmement sensible aux perturbations climatiques (notamment les grandes périodes de sécheresse).
Le sonneur à ventre jaune est effectivement de moins en moins présent sur la vallée, en tout cas, le nombre de station où sa présence est avérée est en baisse (sur les 11 stations actives, seules 4 le sont encore en 2016). Le nombre d’individus adulte est lui aussi en baisse : une dizaine en 2016, contre plus de 50 dans les années 2010.